Yaëlle Trulès : « OPJ a été un vrai tournant dans ma carrière »

Comédienne, chanteuse, présentatrice, réalisatrice… Yaëlle Trulès est une artiste complète. Révélée au grand public par ses rôles dans Cut puis dans OPJ, elle revient sur son parcours, ses multiples casquettes et ses projets à venir.

Pouvez-vous vous présenter pour celles et ceux qui ne vous connaissent pas encore ?

Je m’appelle Yaëlle Trulès, je suis comédienne et présentatrice sur Réunion La Première, une chaîne du groupe France Télévisions.
J’incarne le rôle de Clarissa Hoarau dans la série OPJ, dont nous tournons actuellement la saison 7. Avant cela, j’ai joué dans une autre série, Cut, et j’ai également participé à des comédies musicales et à d’autres projets audiovisuels.

Quels souvenirs gardez-vous de vos débuts dans le spectacle vivant ?

J’ai commencé enfant, aux côtés de mes parents qui avaient une troupe de théâtre à La Réunion. Je faisais un peu de figuration. Je voyais tout cela avec des yeux d’enfant : les costumes, la musique, l’ambiance festive, les repas après les spectacles… J’en garde un souvenir très joyeux.
Mais, paradoxalement, je ne voulais pas du tout être comédienne au départ. C’est venu plus tard, un peu à contre-pied.

Vous êtes comédienne, chanteuse, réalisatrice, chroniqueuse, présentatrice TV… Comment jonglez-vous avec toutes ces casquettes ?

Je ne fais pas tout en même temps. Par exemple, je n’ai plus chanté depuis la naissance de mon deuxième enfant, il y a neuf ans. La musique demandait beaucoup d’investissement : organiser les tournées, trouver des musiciens, des financements… et c’était souvent le soir et le week-end.

La réalisation est venue plus récemment, juste après le Covid, suite à un appel à projets de la région auquel j’ai répondu. J’ai pu réaliser un court-métrage.
En fait, tout dépend des projets, des rencontres, de mes envies du moment. Ce sont surtout les activités de comédienne et de présentatrice qui prennent le dessus actuellement.

Y a-t-il un rôle ou un projet qui a marqué un tournant dans votre carrière ?

Oui, OPJ a été un vrai tournant, car c’est la première fois que j’endosse un rôle principal sur une longue durée. C’est arrivé un peu soudainement, comme un beau cadeau.
Mais il y a eu d’autres projets marquants. Par exemple, la comédie musicale Belle, Belle, Belle, jouée à l’Olympia. On répétait tous les jours, avec des cours de chant, de danse, de théâtre… une vraie école de la scène.
J’ai aussi participé à la comédie musicale Le Roi Lion à Hambourg. Ce fut une expérience à la fois très enrichissante et difficile. Je me suis blessée après quelques mois, ce qui m’a poussée à me recentrer. Je me suis interrogée sur ma culture, sur ce que je voulais vraiment porter artistiquement. Cela m’a ramenée à La Réunion et à un désir plus profond de valoriser notre culture.

Comment percevez-vous l’évolution de la scène artistique réunionnaise ?

Elle est très dynamique. Il se passe énormément de choses, notamment dans l’audiovisuel. Beaucoup de productions extérieures viennent tourner ici, ce qui permet aux techniciens et aux comédiens locaux de monter en compétences et de développer leurs propres projets.
Il y a une vraie émulation. On pourrait croire qu’une petite île finit par tourner en rond, mais ce n’est pas du tout le cas. Je continue de découvrir de nouveaux talents tout le temps.

Y a-t-il des initiatives locales que vous aimeriez mettre en lumière ?

Il y a tellement de choses en cours que c’est difficile d’en citer une en particulier. Ce que je remarque surtout, c’est la montée d’une nouvelle génération, entre 15 et 25 ans, qui prend conscience qu’il est possible de faire carrière dans les métiers artistiques, ici, à La Réunion.
Cela crée une dynamique extrêmement positive. Voir des jeunes croire en eux, se découvrir un talent, s’autoriser à rêver, c’est vraiment beau.

Comment avez-vous intégré l’aventure OPJ ?

Je jouais déjà dans Cut, produite par la même équipe. Après l’arrêt de la série, les producteurs de OPJ m’ont proposé ce nouveau projet.

Qu’est-ce qui vous a séduite dans le personnage de Clarissa ?

C’est une femme de poigne, cheffe de brigade, très affirmée au travail. Mais à la maison, c’est une autre histoire : elle galère avec ses ados, sa vie sentimentale est chaotique… J’aime ce contraste entre l’assurance professionnelle et la fragilité personnelle.

Comment vous préparez-vous physiquement et mentalement pour ce rôle ?

Je fais de la course à pied, un peu de sport en salle, et j’ai aussi fait de la boxe. On a des formations régulières en tir, menottage, techniques d’intervention…
Côté mental, je travaille les textes en amont, environ trois heures par jour, un mois avant le tournage. Je construis des fiches, des courbes émotionnelles, en fonction des relations entre les personnages.

Une scène ou une intrigue qui vous a particulièrement marquée ?

La saison 1 reste la plus marquante pour mon personnage. Clarissa est confrontée à la réapparition de son ex-mari qu’elle croyait mort, et à la fugue de sa fille. C’était très intense émotionnellement.
Aujourd’hui, l’intrigue se recentre plus sur les enquêtes, avec une dimension plus policière. On est aussi passé d’un format quotidien de 26 minutes à un format prime de 52 minutes, ce qui modifie l’écriture.

Quel regard portez-vous sur la représentation des territoires ultramarins à la télévision française ?

Je suis très fière. Déjà parce que les visages ultramarins sont à l’écran, mais aussi parce que l’équipe technique est composée à 90 % de professionnels locaux. La langue créole est présente, la musique locale aussi.

On essaie de ne pas faire quelque chose de communautaire, mais de proposer une œuvre universelle, qui parle à tout le monde, que ce soit en France, en Belgique ou ailleurs. Et ça fonctionne : OPJ est diffusée dans 12 langues, dans de nombreux pays.

Quel retour recevez-vous du public ?

Des retours très chaleureux. Beaucoup de femmes m’écrivent, notamment à propos de la relation mère-fille dans la série. Cela touche, inspire, suscite des vocations. C’est très gratifiant.

Quels défis vous attendent pour la suite de la série ?

Nous travaillons saison après saison. Pour la prochaine, on ajoute davantage de cascades, de scènes physiques. L’équipe de cascadeurs est excellente, ça permet d’explorer d’autres facettes du personnage.

Y a-t-il un rêve artistique que vous n’avez pas encore réalisé ?

Oh, plein ! J’aimerais incarner une avocate, ou un personnage complètement loufoque. J’ai encore beaucoup de rôles que je rêve d’interpréter avant la fin de ma carrière.

Parlez-nous de votre métier de présentatrice.

Aujourd’hui, je présente essentiellement la météo sur Réunion La 1ère . Avant, j’ai aussi animé des jeux, des émissions culturelles, des directs… Mais avec OPJ et d’autres tournages, il m’était difficile de tout concilier.
Présenter la météo, c’est plus léger, mais toujours important, surtout en période cyclonique. Cela fait maintenant plus de 16 ans que je fais ça. Je le fais toujours avec plaisir.

Êtes-vous déjà venue en Belgique ?

Non, jamais ! J’ai vécu en Allemagne, à Hambourg, mais je n’ai encore jamais mis les pieds en Belgique. Il faudra que je vienne un jour !

Quels sont vos projets actuels ou à venir ?

Je vais bientôt tourner dans une nouvelle série qui sortira sur la plateforme de France Télévisions l’année prochaine. Et je travaille aussi sur un projet d’écriture de série, plus ambitieux que ce que j’ai pu faire jusqu’à présent. C’est un vrai défi, mais je suis curieuse de voir où cela va me mener.

Propos recueillis par Stéphanie

Photos : https://yaelle-trules.com/